2024 – Pour une gestion cohérente des animaux utilisés pour pallier un handicap 

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Janvier 2024

 Mise en contexte

Au Québec, la Charte des droits et libertés de la personne reconnaît et protège l’utilisation de deux types d’animaux pour pallier un handicap : les chiens-guides et les chiens d’assistance.

Afin de se prévaloir de ce droit, la Commission des droits de la personne et de la jeunesse (CDPDJ) demande à la personne handicapée de fournir deux preuves distinctes que l’animal a reçu un entraînement adéquat :

  • Le propriétaire de l’animal doit s’assurer que son chien porte un élément identifiant l’organisation ayant procédé à l’entraînement de l’animal. Par exemple, un chien-guide pourrait porter un harnais au couleur de son centre d’entraînement.
  • Le propriétaire de l’animal doit aussi être en mesure de montrer un document émis par le centre d’entraînement attestant de l’entraînement reçu.

Les chiens-guides et les chiens d’assistance sont des animaux ayant reçu un entraînement les outillant à poser des actions pouvant pallier un handicap. Cet entraînement de pointe assure aussi que le chien se comporte adéquatement en public, assurant la sécurité de la personne utilisatrice et du grand public.

Conformément à la Charte des droits et libertés de la personne, une personne handicapée ne peut se voir refuser l’accès à un lieu public ou un service parce qu’elle est accompagnée de son animal. Par exemple, une personne gérant un établissement ne peut pas refuser l’accès à une personne utilisant un chien-guide ou un chien d’assistance. La personne responsable d’un établissement a aussi la responsabilité de s’assurer que l’ensemble de sa clientèle et de son équipe de travail soit en sécurité. C’est à ce moment que l’attestation de l’entraînement reçu entre en jeu. Cette attestation devrait rapidement permettre à la personne gérante de s’assurer que :

  1. Le chien sert à pallier un handicap et que son utilisation est protégée par la Charte.
  2. Le chien a reçu un entraînement qui garantit un comportement tranquille et sécuritaire pour toutes et tous.

À travers l’attestation et le logo présent sur le foulard ou le harnais de l’animal, la décision d’accepter ou non une personne accompagnée d’un chien devrait être facile. Et pourtant…

Des certifications obligatoires et inexistantes

Au Québec, il n’existe aucune accréditation permettant de s’assurer que les écoles de formation sont compétentes à entraîner des chiens-guides ou des chiens d’assistance. De plus, aucun registre n’est disponible pour s’assurer que l’école est officiellement reconnue par le Québec.

En reprenant l’exemple de la personne gérante d’un restaurant, elle n’a aucun moyen de valider que l’école d’entraînement a les compétences nécessaires pour former adéquatement des chiens-guides ou des chiens d’assistance. Elle doit se fier à son jugement et ses connaissances pour savoir si l’animal est réellement formé. Il arrive d’ailleurs encore trop souvent qu’une personne aveugle ou malvoyante se fasse refuser l’accès à un lieu public parce que son chien-guide a été formé dans une école moins connue du grand public. Pourtant, ces animaux sont parfaitement formés.

Cette absence d’accréditation a aussi donné naissance à des organisations vendant des « chiens d’assistances » incapables de pallier un handicap et présentant des problèmes de comportement. Ces organisations profitent d’une absence d’encadrement pour faire de l’argent tout en pouvant mettre en danger les personnes handicapées et le grand public.

Une absence d’attestation uniformisée

En plus de ne pas être en mesure d’accréditer des écoles de formation reconnue, le gouvernement du Québec ne met pas de l’avant une attestation standardisée au Québec. C’est-à-dire que l’école d’entraînement est le seul juge de la capacité du chien à remplir sa mission. C’est aussi l’école qui a la responsabilité d’émettre le document d’attestation. Chaque organisation est libre du format de son attestation. Cela complexifie encore la tâche d’une personne qui souhaite s’assurer de la formation d’un chien-guide ou d’un chien d’assistance.

Ajoutons qu’il est facile en quelques clics de se procurer une attestation sur des sites de vente en ligne comme Amazon ou eBay. Pour environ 40$, il est possible de se procurer une carte d’un réalisme déconcertant et d’aller dans des lieux publics avec des chiens non entraînés pouvant avoir des comportements inadéquats.

L’ouverture de la CDPDJ envers les animaux n’ayant pas reçu d’entraînement.

Même si pour l’instant il n’y a que les chiens-guides et les chiens d’assistance qui sont reconnus pour pallier un handicap, la CDPDJ mentionne qu’une personne utilisant un animal de soutien émotionnel sans entraînement a le droit de formuler une demande d’accommodement raisonnable si sa demande est accompagnée de documents rédigés par un « professionnel » qui justifie le besoin de la personne et l’utilité de l’animal pour combler ce besoin.

Il est clair que dans la large majorité des cas, les personnes recevant une demande d’accommodement n’ont pas l’expertise pour analyser le comportement d’un animal n’ayant pas reçu d’entraînement et évaluer le risque que cela peut poser. Ajoutons que la notion de professionnel est très floue.

N’oublions pas que l’entraînement reçu par un chien-guide ou par un chien d’assistance n’a rien à voir avec le dressage classique d’un chien. L’entraînement est rigoureux. Il s’axe à la fois sur le développement de compétences pour pallier le handicap d’une personne et sur une socialisation longue qui lui permet de développer des attitudes adéquates lorsqu’il fréquente des lieux publics.

Recommandation

La population générale n’est pas nécessairement au courant des subtilités de l’utilisation d’un animal pour pallier un handicap. Les différentes situations présentées dans cet avis ouvrent la porte à de nombreux abus pouvant ultimement nuire aux personnes qui utilise des chiens guides et des chiens d’assistance. Pour éviter cette situation, le RAAQ dépose trois recommandations :

  1. Que le gouvernement du Québec établisse une accréditation pour les organisations qui souhaitent former des chiens-guides et des chiens d’assistance. Pour développer cette accréditation, il sera possible de se baser sur les écoles de formation déjà actives et reconnues. Il devra cependant être possible pour une organisation hors de la province d’obtenir l’accréditation puisque plusieurs personnes choisissent de faire affaire avec des écoles de formation canadienne ou américaine.
  2. Que le gouvernement du Québec développe une certification standardisée pour les chiens-guides et une certification standardisée pour les chiens d’assistance. Pour obtenir une certification, le chien doit développer des éléments de compétence propre à son futur rôle. Le document attestant la formation du chien doit lui aussi être standardisé.
  3. Si le gouvernement du Québec souhaite aller de l’avant dans la reconnaissance des animaux de support émotionnel comme moyen de pallier un handicap, ces animaux doivent impérativement être entraînés. Il serait donc nécessaire de développer une certification propre aux animaux de support émotionnel incluant des éléments de compétence pouvant être évalués et d’émettre une attestation standardisée.